De quel étrange animal va-t-il encore nous entretenir, vous demandez-vous. Tant il est vrai qu'on n'attrape pas deux fois le petit futé que vous êtes.
Et vous n'aurez pas (tout à fait) tort.
Dans le Borinage (région située à l'ouest de Mons) se situe un village étrange. Non qu'il se distingue des autres par une architecture particulière, une ambiance spéciale ou que sais-je encore, non, ce village, Flénu, présente une particularité dans l'idiome local : le borain.
Alors que l'on dit "Je vais à Frameries, à Quaregon, à Hornu, à Dour, à Saint-Ghislain,...", on dit " Je vais au Flénu"
Moi qui habitais de l'autre côté de Mons, je ne connaissais du Borinage que l'accent de mes condisciples du secondaire issus de cette région, mais Broche venait de Frameries, Ruelle de Cuesmes, Rousselet de Jemappes, personne ne venait "du" Flénu.
Ce n'est qu'en débarquant à Hornu pour y faire mes études de chimie que j'ai rencontré cette particularité. Voici dans quelles circonstances.
L'association des étudiants organisait un bal annuel dans les locaux d'une école voisine. Cette école comportait une section "Beaux-arts". Nous avions donc fait appel à ces voisins pour réaliser la décoration de la salle de bal.
C'est à cette occasion que j'ai rencontré ma première Artiste. Elle peignait à grands coups de brosse une immense feuille de papier. Pour ce faire, elle était agenouillée et chaque fois qu'elle s'étendait, se mettant à quatre pattes pour atteindre un coin reculé de son œuvre, le pull très lâche qu'elle portait et qui pendait presque jusqu'au sol, découvrait son dos nu.
Vision étrange pour un jeune-homme de mon époque, habitué à des condisciples en complet-veston pour les mecs et tailleur et chemisier pour les filles. Je n'étais pas au bout de mes surprises.
Comme les choses devaient durer assez longtemps, j'avais emprunté la voiture de mon père au cas où il n'y aurait plus eu de train pour rentrer. L'artiste qui, une fois sur ses pieds, avait cette fois les manches du pull qui lui descendaient jusqu'aux genoux, l'artiste donc, ayant achevé son oeuvre, demande à la cantonade si quelqu'un peut la reconduire.
Je me propose de le faire et lui demande où elle habite. "Au Flénu", me dit-elle.
Je l'ai donc reconduite, en suivant ses indications, dans ce patelin dont je ne savais même pas où il se trouvait. Durant ce trajet, je l'observais du coin de l'œil. Ma première artiste dis-donc ! Elle était plutôt maigre, les yeux charbonnés (sans doute une coutume locale de cette région minière), jean troué et pull comme je vous ai dit, bâillant sur une poitrine modeste, ferme et nue.
Et, vous savez quoi ? C'est moi qui n'étais pas trop rassuré !
Ah, oui... l'animal !
En cherchant un peu sur le net, j'ai cru comprendre que le nom de Flénu viendrait de "flenne", belette en roman et "ut" désinence en marquant l'abondance. On se rendait donc à l'endroit riche en belettes : au flénu.
Edit du 8 décembre :
Le cercle héraldique de Mons propose les armes suivantes pour Flénu :