Sur le blog d'Adrienne, le jour de mon anniversaire, on parlait de l'égalité des sexes.
Dans les commentaires, Adrienne me demandait si j'avais regardé les vidéos renseignées par Caro.
La réponse est "Oui, j'ai vu !"... et pour tout dire, dans ma longue existence, j'ai vu bien d'autres choses. Si je ne suis pas assez âgé pour avoir connu la grande époque des suffragettes anglaises, ni celle des ligues féminines américaines, je le suis assez pour avoir connu dans mon pays la concession du droit de vote aux femmes pour les élections parlementaires (c'était en 1948).
Après ça, plus rien ne m'a été épargné échappé, des tigresses du MLF aux chiennes de garde, et je passe sur les Groult, de Beauvoir et autre Badinter.
Mais rien ne vaut l'expérience personnelle :
L'ONU déclare mille-neuf-cent-septante-cinq année internationale de la Femme. Cette année-là, je viens d'être élu Chef d'Unité et, conscient de mes devoirs envers les jeunes dont je supervise l'encadrement, je participe à l'annuel Congrès des Chefs d'Unité organisé par la Fédération des Éclaireuses et Éclaireurs.
Lorsque je débarque, plein d'allant, sur le lieu du congrès (en l'occurrence l'ancienne abbaye de Brogne à Saint-Gérard transformée en auberge de jeunesse), admirant au passage la pancarte "Congrès des CU" trônant dans la parking de l'institution, les organisateurs me tombent sur le paletot.
"Vous, le nouveau, au nom de la coéducation, vous êtes désigné volontaire pour participer au groupe de discussion sur l'année internationale de la femme, il n'y a que des filles inscrites pour l'instant !"
À l'heure dite, je pénètre dans la salle réservée au groupe que j'ai choisi (Tonton, pourquoi tu tousses ?), prends place sur un siège au milieu de quelques représentantes du beau sexe (je ne dis pas faible, je ne suis pas fou !) et immédiatement, mes phéromones mâles font leur effet sur ces dames :
Elles me jettent des regards aussi accusateurs qu'assassins et m'exposent avec énergie, leurs griefs vis-à-vis du mouvement, de leurs conjoints, du monde en général et de moi, en particulier, au point que je me demande comment les cons qui m'ont choisi "Merle moïsiaque" (on ne rit pas !) comme totem ont pu passer à côté de "Bouc émissaire" qui eût bien mieux convenu en la circonstance.
Après qu'elles m'aient épluché par le détail les statistiques de la composition des staffs de tous les niveaux de la fédération, pour constater que plus on s'éloigne de la base, plus la proportion de femmes présentes à chaque niveau diminue, pour se terminer, outrage ultime, par la présence d'une unique femme parmi les douze membres du Conseil Fédéral, elles me posent LA question :
"Pourquoi ?!?"
Si la vigueur de leur attaque m'a un brin désarçonné, elle ne m'a pas enlevé mon sens de l'analyse (on est chimiste ou on ne l'est pas) et je risque, d'une voix calme et posée, l'hypothèse qui me paraît la plus plausible, l'accès à ces postes étant dans notre grand mouvement démocratique sujet à élections : "Peut-être n'y a-t-il pas assez de candidates ?"
C'est là que j'ai enfin vraiment compris ce que devait être la position des pandores évoqués par Brassens au milieu des furies du marché de Brive-la-Gaillarde.
"Les enfants !"
"Les repas !"
"Le boulot !"
"Le mari !"
"La lessive !"
"La maison !"
"L'école !"
J'ai échappé de peu aux coups de mamelles et j'ai risqué un faible : "Stéréotypes !" en refermant derrière moi le battant de la porte où s'est fiché le "Bowie knife" lancé par une main vigoureuse.