Les voiles de la mémoire
Les participants aux défis du samedi pourraient peut-être essayer d'imaginer ce qui peut bien relier les oranges pressées au nom d'une personne. Car, allez savoir pourquoi, ce matin en pressant les oranges du petit-déjeuner de mon épouse, j'essayais de me souvenir de son nom.
Mais non, pas de son nom à elle, voyons... de son nom à lui ! Ce n'est pas en anglais que vous seriez amenés à faire cette lamentable confusion : j'aurais écrit "his name" et pas "her name". Vous comprenez pourquoi le français est voué à disparaître ? (petite pique à mes ex-confrères de fllf)
C'est bien moi ça ! Un type me dit son nom, me sauve la vie et quelques malheureuses années plus tard, j'en suis à essayer de me le rappeler, quelle ingratitude.
Je me torturais donc les méninges mais bernique. Je ne faisais resurgir que des visions de plafond peint d'un ciel paisible piqueté d'oiseaux en vol, un nom à consonance biblique et, derrière moi, deux voix débitant en les exécutant les points successifs de la procédure de placement d'un port à cathéter jugulaire, étrange litanie qui reste une de mes plus étonnantes expériences d'auditeur qualité.
À force de creuser, deux autres choses me sont revenues : ce nom était un prénom et contenait un "a".
Alors... Lazare ? Non, trop beau pour être vrai que Lazare m'ait sorti du tombeau !
Après avoir ressassé un long moment encore mes souvenirs tant hospitaliers que bibliques, j'ai dû déclarer forfait. Mais dès le petit-déjeuner avalé, je me suis précipité sur l'ordinateur et, dans la liste des urgentistes, le dernier nom m'est enfin sauté aux yeux : Salomez !
Salomé, la danse des sept voiles, la tête sur le plateau...
Certes, je ne m'appelle pas Jean-Baptiste, mais c'est quand-même pas loin... j'en frémis encore !