Histoire piquante
Anaïs, sur son blog, nous a écrit une sorte de litanie sur le mode "Quand j'étais môme". Elle m'a bien amusé et à force de comparer l'environnement de sa jeunesse avec celui de la mienne (quand Anaïs est née, j'étais déjà vieux), je me suis souvenu d'un petit événement qui concerne mon frère puîné.
À l'époque, quand j'étais môme donc, une infirmière était venue chez nous pour faire une injection à mon frère de quatre ou cinq ans.
Les seringues de ma jeunesse n'étaient pas du tout comme celles d'aujourd'hui qui nous arrivent sous blister, pré-stérilisées. Elles étaient en verre et métal, complètement démontables, réutilisables et il fallait les désinfecter avant chaque usage (bonjour les hépatites).
À cet effet, les infirmières les trinqueballaient dans de jolies boîtes en laiton chromé et, avant d'en utiliser une, elles remplissaient sa boîte d'alcool pour y faire mariner la seringue. Ces seuls préparatifs faisaient déjà blêmir mon frère.
Au moment crucial, l'infirmière remplissait la seringue et couchait mon frère, les fesses à l'air, sur la table. Elle avait une technique d'injection qui devait beaucoup à l'art des banderilleros : elle coinçait l'aiguille entre l'index et le majeur et balançait une bonne claque sur le popotin de mon frère. Selon elle, la claque dissimulait la douleur de la pénétration de l'aiguille. Elle adaptait alors la seringue sur l'aiguille pour procéder à l'injection proprement dite.
Sauf qu'entre la claque planteuse d'aiguille et l'injection, mon frère était prestement descendu de la table, l'aiguille dans la fesse, et s'était réfugié du côté opposé à l'injecteuse, poussant des cris de goret qu'on mène au sacrifice.
Avait alors commencé un match poursuite où je tenais le chrono d'une main impartiale. Seule l'intervention en traître de ma mère a permis à mon frère de ne pas terminer ses jours une aiguille dans le cul.